La norme était de travailler de 9h à 17h, cinq jours par semaine, au bureau. Certaines entreprises acceptaient le travail à domicile pendant un ou deux jours. Mais cela ne concernait qu’un petit nombre de personnes.
Plusieurs raisons expliquent cela, notamment :
Le manque de connectivité
Les appels vidéo étaient rares pour la plupart des employés. Des outils comme Microsoft Teams et Slack n’en étaient qu’à leurs débuts, principalement utilisés pour les vérifications rapides et pour les commérages , plutôt que pour encourager et améliorer la productivité.
Manque de confiance
Deuxième raison – et probablement la plus fréquente – de la résistance au travail à domicile : celui-ci était souvent considéré comme un jour de congé gratuit. En plus du manque de confiance des cadres envers les employés, le travail à domicile n’était absolument pas perçu comme étant un moyen pouvant améliorer la productivité de la main-d’œuvre.
Arrive le Covid et le travail à la maison
Ces hypothèses ont été bouleversées pendant la pandémie, lorsque le travail à domicile est devenu la norme pour de nombreuses personnes. Cette technologie, auparavant peu utilisée, est devenue essentielle, et même le facteur qui a véritablement fait la différence. Les réunions en ligne sont désormais l‘unique moyen de connexion, et les appels vidéo, ainsi que les fonctions de chat, permettent aux employés de rester mobilisés, productifs et de garder le contact.
Alors que les entreprises, petites et grandes, ainsi que nombre de chroniqueurs dans les médias, présageaient la fin du travail et de la productivité, quelque chose de surprenant est survenu. Plutôt que de procrastiner à la maison, les employés se sont révélés plus productifs dans cette nouvelle configuration. Cela s’explique en grande partie par le fait que le travail à domicile permet aux employés de passer plus de temps avec leur famille et leurs proches. Les employés qui ont fait la navette pendant des décennies ont découvert une toute nouvelle expérience de travail.
Ce facteur a stimulé l’engagement et, dans certains secteurs (notamment celui de la technologie), a créé de nombreux emplois. Auparavant, les employeurs restreignaient leur vivier de talents à un lieu spécifique. Grâce au télétravail, ils ont accès à un vivier beaucoup plus large, ce qui signifie une main-d’œuvre plus diversifiée, y compris des candidats qui ne pourraient pas faire le trajet quotidien, comme des personnes handicapées, des parents isolés et des personnes d’autres pays. En l’occurrence, de nombreux recruteurs ont étendu leurs recherches à l’étranger et ont créé avec succès des équipes régionales hybrides.
L’essor du modèle de travail hybride
En 2020 et 2021, les employés du monde entier ont prouvé que le travail à domicile ou hybride permet de créer des équipes plus performantes et plus diversifiées. Ils ont démontré qu’ils étaient non seulement productifs, mais aussi très impliqués. Et surtout, ils ont montré qu’on pouvait leur faire confiance.
Cela s’appliquait à tous les employés. Du stagiaire au directeur. Des plus jeunes aux plus âgés. Tandis que les employeurs vantaient les vertus du télétravail et du travail hybride, les observateurs prévoyaient la mort du bureau, signe avant-coureur de la Grande Démission, où les employés démissionnent en masse, à la recherche d’une vie au soleil sur les plages tropicales du monde entier.
De retour au bureau ensemble
Dès la fin de la pandémie annoncée par l’OMS, une nouvelle panique a surgi. Plutôt que d’accepter les preuves évidentes, les employeurs ont préféré « inciter » leurs employés à revenir au bureau. Certains offraient une nouvelle gamme d’avantages. D’autres, comme les grandes banques, ont été moins subtils.
D’autres encore ont changé complètement de position. Ainsi, après avoir promis le travail à domicile et hybride, tout le personnel retourne au bureau, de 9h à 17h, cinq jours par semaine, invoquant la « sécurité » comme justification. Mais cela n’est qu’une excuse, au vu des années de pandémie. Une explication plus probable relève du manque de contrôle et de vision des cadres supérieurs, dont la majorité sont des hommes de plus de 50 ans.
Dans d’autres secteurs, l’évolution a été plus progressive. Les géants de la technologie, par exemple, ont d’abord hésité à franchir le pas, préférant que les employés reviennent d’eux-mêmes. Cependant, le resserrement de l’économie et du marché mondial de l’emploi a encouragé les plus grandes entreprises à parier sur le chômage à grande échelle, décourageant ainsi les employés à réagir, voire démissionner, en signe de protestation.
Bureau vs domicile, un combat continu
L’attitude des salariés a changé. Ils ont vu la lumière. Ils ne sont plus satisfaits des conditions de travail d’avant la pandémie. Ils ne sont plus disposés à céder tout pouvoir à leurs employeurs. Malgré les temps difficiles, ils se mobilisent en masse.
Récemment, les travailleurs d’Amazon ont fait grève aux États-Unis pour protester contre le retour au bureau. Un nombre croissant d’employés préfère leur bien-être mental à une carrière oppressante au sein d’une grande multinationale.
Ce sera la ligne de front en 2024 et au-delà.
Mais qui gagnera ? Les salariés privilégiant la famille, l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée et une bonne santé mentale. Ou les grandes entreprises, personnifiées par des personnalités comme Elon Musk, insistant sur le contrôle total, ou le PDG du groupe Gurner, Tim Gurner, déclarant dans une interview récente qu’il préférerait un retour à l’époque victorienne des workhouses, et qu’il serait heureux si le chômage atteignait 40 à 50 %, car cela donnerait une leçon aux employés.
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